dimanche 9 juin 2013

EMERGENCY

Il est urgent de vivre, de ne pas s'économiser.

C'est dans la torpeur et froideur d'un matin de mai, que cette pensée m'a frappé de plein fouet.
Elle avait fait du chemin depuis les rues du huitième arrondissement, les toiles de picasso, le bruit de la moto de mon frère, l'odeur du cambouis, et ce cimetière de province au goût de neige et de granit pâle.

J'ai pris conscience que le temps aura sur moi un effet dévastateur, je n'échapperai pas à l'obsolescence programmée. Mes cheveux se feront plus fins, plus éparses, des sillons sinueux habiteront mon front, le coin de mes yeux, et puis ma peau se tâchera, ou sentira l'odeur acide et âcre du temps qui passe.

Alors j'ai triché, menti, inventé des vies, j'ai osé le nom d'emprunt, j'ai osé les lèvres des inconnus et j'y ai même replongées. J'ai osé les soirées où je ne connaissais personne, j'ai accepté de raconter un milliard de fois ce que je faisais et rire à des blagues que je ne trouvais pas drôle. J'ai été beau comme jamais et stupide comme toujours. A grand renfort de gin et de vodka, j'ai été cet autre magnifique et con à la fois, le genre qui attise la curiosité et la retenue.